Nuage Ombragé a écrit:

♫ DANSE LYRIQUE ♫

- MORT DE DANSE LYRIQUE feat. FORÊT NOIRE -

« AU SECOURS ! »
Le cri paniqué de Danse Lyrique résonna dans la tanière des soigneurs, où seule était étendue sur le flanc, les yeux écarquillés de stupeur. Les battements effrénés de son cœur la secouaient entièrement et son souffle saccadé créait des panaches blancs dans l’air matinal encore froid du début de la Nouvelle Saison. En s’éveillant ce matin, alors que les faibles rayons du soleil filtrant à travers l’entrée signifiait un réveil tardif, Danse Lyrique n’avait pas pu se lever. Comme si tout son corps était bloqué. Paralysé. Cédant à la panique à cette pensée, les yeux encore fonctionnels de la soigneuse cherchaient autour d’elle une aide rassurante à laquelle se raccrocher.
Finalement, Symbole Runique entra dans la tanière et dévisagea la chatte tigrée, interdite :
« Danse Lyrique ? Tout va bien ?
- A merveille, cracha cette dernière, sarcastique. Ben non, regarde-moi, tu ne vois pas ? Je ne peux plus bouger. Je… je ne sens plus rien !
- Plus rien ? répéta sa camarade, écarquillant les yeux.
Elle ne savait pas si, au vu de la réputation de Danse Lyrique, celle-ci lui faisait une mauvaise blague ou pas. Cependant, ce n’était pas son genre, de se montrer en si mauvaise posture. Symbole Runique s’approcha et lui palpa le corps :
- Et là ?
Ballade serra les crocs, observant, qu’en effet, elle ne sentait pas les pattes de la soigneuse sur son pelage :
- Non !
La chatte rousse et blanche continua ainsi, l’examinant avant de balbutier, étonnée par ce phénomène inexpliqué et brutal :
- Je… je suis désolée, je ne sais pas ce que tu as… je vais prévenir les autres. On verra avec le temps, je te jure que l’on va trouver un traitement. D’accord ?
- Je ne vais pas rester comme ça ! s’étrangla-t-elle, en proie à la panique. Tu ne vas pas me laisser comme ça ! Comment je vais faire, moi ?!
Mais Symbole Runique secoua la tête, confuse. Elle ne savait pas et s’en voulait pour cela. Elle était portant soigneuse mais ses mentors ne lui ont jamais parlé de paralysie brutale comme celle-ci :
- Quelle soigneuse incapable tu es, gronda Ballade furieusement, amène-moi Forêt Noire, il saura quoi faire ! Ou… ou ma mère !
Symbole Runique recula d’un pas, atterrée, sensible à ses paroles avant de sortir de la tanière, laissant Danse Lyrique gronder de frustration au fond de son nid.

***

Une lune et demie passèrent. Si longues, si éprouvantes pour Danse Lyrique, dont son état n’avait guère évolué. Toujours dans la même position, c’était les autres qui devaient la faire manger, boire, la toiletter, s’occuper d’elle comme si elle avait régressé au stade de nouveau-né. Cela aurait pu lui plaire, car elle avait toujours apprécier que l’on s’occupe d’elle comme une véritable princesse. Cependant, le fait de ne plus rien ressentir était plus qu’alarmant et la soigneuse grise sentait que rien ne s’améliorait malgré les essais et recherches des soigneurs présents. Au contraire, elle commençait à ne plus sentir le bout de sa langue et les bords de son palais. Alors, elle se laissait aller… peu à peu, elle s’était laissée sombrer en silence dans la résignation : elle allait y passer. Lentement mais sûrement. Elle n’était pas soigneuse pour rien ; elle pouvait elle aussi comprendre que bientôt, mâcher serait impossible, avaler également, puis prendre la parole ne sera plus qu’un lointain souvenir. Aurait-elle seulement la capacité de penser ? Elle l’ignorait mais cela la terrifiait. Tout comme mourir à petit feu. Elle ne souffrait pourtant pas physiquement ; tout était indolore pour elle. N’importe qui pouvait lui trancher les entrailles, elle était certaine qu’elle ne sentirait rien. Au début, elle s’était longuement plainte de sa condition, mais à présent, elle n’était que l’ombre d’elle-même, constamment plongée dans ses pensées, très souvent silencieuse, parler lui demandant de plus en plus d’effort. D'extérieur, on pourrait penser qu'elle ne ressentait plus rien non plus au fond d’elle, alors qu’un cataclysme de pensées et d’idées noires s’entrechoquaient avec violence. Sa vie tournait en boucle dans son crâne, chaque évènement passé, chaque discussion, chaque chat... Golem, Lueur d’Obscurité, Berceuse, Mélodie, Chant, ses camarades du Clan de la Nuit, ceux de la Tribu du Zénith, Forêt Noire… Forêt Noire… relevant les yeux vers son camarade afféré prêt d’elle, dans un silence religieux, Danse Lyrique l’observait, sans mot dire. Après tout, il cherchait de la sauver par tous les moyens ; ne l’avait-elle pas fait, elle aussi ? Elle s’était longuement inquiétée pour lui, chaque jour qui passait, elle l’avait soutenu de suite après le décès de sa sœur, Ballade ne s’était pas arrêtée là, comme hypnotisée par lui. La soigneuse avait tenté par tous les moyens de lui redonner le sourire après la mort de Comète Arcanique et lui faire penser à autre chose, traumatisée par le récent évènement. Toute sa vie n’était qu’en orbite autour de son meilleur ami, Danse Lyrique ne s’en était pas plainte le moins du monde, alors, si le soigneur venait à concrétiser l’action décisive qui signifierait pour elle de vivre seule, elle ne le supporterait probablement pas. Elle se souvient encore d’avoir sauté sans réellement y réfléchir. Elle ne l’aurait pas fait pour quiconque sauf lui, elle espérait qu’il s’en rendait bien compte. Cependant, aujourd’hui, elle commençait à comprendre… à réaliser qu’il pourrait se passer d’elle, si elle venait à rejoindre les étoiles. Allongée sans bouger, à seulement réfléchir, Ballade était entrée dans une longue introspection. Elle en était finalement arrivée à la conclusion qu’elle avait toujours considéré avec déni ; elle n’aurait jamais la place dans son cœur. Pas celle à laquelle elle aspirait. C’était certes frustrant, mais aujourd’hui, elle avait compris que cela n’avait plus d’importance. Pas après avoir failli perdre sa dernière sœur de portée. Ni même avoir perdu l’amitié de ses anciens camarades comme Nuage Ombragé. Pourquoi avoir été aussi aveuglée par un amour inexistant ? Quelle perte de temps. Son cœur se serra à cette pensée. Néanmoins, son affection pour lui sera toujours aussi intense que possible, incapable de la réfréner.
« Eh. Forêt Noire… articula-t-elle d’une voix morne et engourdie, les yeux dans le vague.
Le chat crème et brun cessa sa tâche et tourna la tête vers elle :
- Donne-moi… ces fichues baies empoisonnées...
Le soigneur ne parut pas comprendre mais Ballade continua sans lui laisser le temps de répondre, au prix d'un effort insurmontable :
- Je sais que je ne guérirai… jamais, tu le sais aussi… ça s’empire… chaque jour, souffla-t-elle avec difficulté. Je ne veux pas… continuer comme… ça.
Danse Lyrique remonta ses pupilles ambrées vers lui, déterminée, résolue. Elle y avait longuement réfléchi. C’était tout acté. Elle avait déjà songé à d'autres méthodes comme en refusant de manger, mais ce serait encore long et fatiguant. Elle n’en pouvait plus. Elle saisissait l’importance de son acte et les conséquences qui allaient suivre, mais sa famille comprendrait, elle le savait. Vivre ainsi n’était pas possible et Ballade n’avait jamais eu assez de force pour se battre. Quête d’Excellence y arrivait, elle, mais elle était née ainsi et n’était paralysée qu’au bassin, son cas était donc différent. Elle préférait donc baisser les pattes lâchement, mais simplement. La conclusion avait été longue à tirer ; si personne ne connaissait le moyen de remédier à son mal, si tout se détériorait peu à peu... elle ne pouvait pas être optimiste concernant l’avenir qui l’attendait.
Il fallait qu’elle agisse avant qu’il ne soit trop tard :
- Ne me fais pas… changer d’avis, grommela-t-elle entre ses crocs devant son hésitation. C’est décidé… donne-les moi. Aide…moi… »
Aide-moi à mourir…

Au dehors, les vagues se jetaient contre la pierre, faisant tournoyer l’écume, apportant la mélodie permanente de la mer aux oreilles du chaton. La petite était blottie sur un tas de plumes, perdue dans un sommeil agité. Les grains de sable venaient picoter sa peau à chaque mouvement et le goût du sel chatouiller ses papilles. Et ce son qui lui montait aux tympans, assourdissant son esprit, comme inondant ses sens, comme…noyée. Dévoilant ses prunelles couleur iolite, la féline ouvrit ses paupières en sursaut et un rayon de lumière vint éblouir sa vision. Le chaton se recroquevilla sur elle-même, se heurtant à un corps chaud, blanc, replié contre ses poils noirs, avant de découvrir une paire de grandes billes gris-vertes, fixées sur elle. Paniquée, la féline jeta des coups d’œil nerveux aux alentours, sur les vieux murs de pierre qui l’entouraient de toute part, vers l’escalier qui disparaissait dans la pénombre, et la petite fenêtre ouverte sur le ciel bleu azurin, trop haute pour qu’elle ne puisse l’atteindre.
Qui était-il, ce félin couleur crème ? Où était-elle ? Son frère… ! Son frère ? Elle avait un frère ? Tout s’embrouillait dans ses pensées, tandis qu’elle cherchait à rappeler à sa mémoire les événements qui l’avait amenée jusqu’ici. Mais seul le vacarme de l’eau remplissait ses pensées en flash, et l’obscurité, et la pluie, et l’air l’air qui lui manquait ! Son dos se fit rond, et les poils hérissés, elle lâcha un feulement, qui sortit de sa gorge comme un cri apeuré.

Nuage Scindé a écrit:

Au dehors, les vagues se jetaient contre la pierre, faisant tournoyer l’écume, apportant la mélodie permanente de la mer aux oreilles du chaton. La petite était blottie sur un tas de plumes, perdue dans un sommeil agité. Les grains de sable venaient picoter sa peau à chaque mouvement et le goût du sel chatouiller ses papilles. Et ce son qui lui montait aux tympans, assourdissant son esprit, comme inondant ses sens, comme…noyée. Dévoilant ses prunelles couleur iolite, la féline ouvrit ses paupières en sursaut et un rayon de lumière vint éblouir sa vision. Le chaton se recroquevilla sur elle-même, se heurtant à un corps chaud, blanc, replié contre ses poils noirs, avant de découvrir une paire de grandes billes gris-vertes, fixées sur elle. Paniquée, la féline jeta des coups d’œil nerveux aux alentours, sur les vieux murs de pierre qui l’entouraient de toute part, vers l’escalier qui disparaissait dans la pénombre, et la petite fenêtre ouverte sur le ciel bleu azurin, trop haute pour qu’elle ne puisse l’atteindre.
Qui était-il, ce félin couleur crème ? Où était-elle ? Son frère… ! Son frère ? Elle avait un frère ? Tout s’embrouillait dans ses pensées, tandis qu’elle cherchait à rappeler à sa mémoire les événements qui l’avait amenée jusqu’ici. Mais seul le vacarme de l’eau remplissait ses pensées en flash, et l’obscurité, et la pluie, et l’air l’air qui lui manquait ! Son dos se fit rond, et les poils hérissés, elle lâcha un feulement, qui sortit de sa gorge comme un cri apeuré.