Le matou avait suivit le petit groupe sans réellement faire attention à l'endroit où Fleur de Myrtille les emmenait. Le matou était, comme toujours ces derniers temps, complètement perdu dans son esprit et épuisé. Mais comme toujours, il faisait bonne impression, du moins, il essayait. Arrivé aux petits bois, il fit quand même un effort pour être présent et écouter ce qu'il se passait. Il n'avait pas envie que son amie remarque son absence, et il ne voulait pas là laisser seule avec ces deux apprentis qui n'avaient pas l'air de se sentir très concerné.

-Eh ! C'est à vous qu'on parle hein.

Miaula-t-il avec une certaine dureté, espérant que cela suffise à en faire réagir un.

La matou avait à peine entendu Nuage de Cendre lui proposer de chasser qu'il s'était retrouvé dans la forêt à ses côtés sans savoir où il allait. La petite féline l'intriguait, enfin, c'était surtout son nom, comme si elle portait le sien. Tout se mélangeait dans son esprit et il ne l'entendait même pas parler. Seulement, lorsqu'elle se mit à accélérer le pas, il suivit tout naturellement, sentant certaines de ses blessures se tirer douloureusement, mais il n'y fit pas attention, continuant à là suivre comme un guide. Peut-être que c'était ce qu'elle était, une guide à ne surtout pas perdre.

-On va où ?

Finit-il par lui demander, commençant progressivement à reprendre conscience de ce qui l'entourait.

Rapace des Monts emmena son apprentie au petit bois. Nuage Obscur avait un caractère bien trempé, mais le guerrier avait bon espoir concernant ses capacités.

"- Aujourd'hui on va chasser ici. C'est très différent que la chasse au lapin dans la lande, mais je pense qu'il faut aussi savoir chasser en forêt. Si un jour tu dois survivre dans un territoire boisé, cela peut te sauver la vie. Dis moi à quoi tu devras faire attention ici."

Le guerrier était envahi par les souvenirs, il ne savait pas comment se comporter et, du coup, il passait le moins de temps possible au camp afin de ne pas croiser Geai des Chênes. Ce jour là il avait donc proposé un entrainement à Nuage de Mouette, ce qu'elle avait accepté sans hésité. Arrivé aux petits bois, il fut étonné par la question de l'apprentie, ce qui le fit légèrement ronronner.

-Si tu sais faire, alors vas-y, je t'observe.

Rapace des Monts hocha la tête. Malgré son fort caractère, Nuage Obscur apprenait vite, et le guerrier était à chaque fois content de partir en entrainement avec elle. Contrairement à Nuage de Mouette, elle n'avait pas peur et cela la faisait progresser plus vite.

"- En effet, tu dois te servir surtout de ta truffe et de tes oreilles. Tout en faisant attention à où tu poses tes pattes. Peux tu me montrer ta position du chasseur ? Tu auras besoin d'une position impeccable pour attraper une proie ici. Il ne faut pas courir vers ta proie comme dans la lande, mais t'en approcher doucement sans qu'elle ne t'aperçoive."

"- C'est pas mal du tout." Miaula Rapace des Monts en faisant un tour de Nuage Obscur pour être sûr de sa position.

"- Fais attention à la fourrure de ton ventre, elle est si imposante que tu risques de frôler des brindilles ou des feuilles." Lui conseilla-t-il alors après un regard vers ses pattes.

Il s'éloigna finalement pour pousser un caillou un peu plus loin de Nuage Obscur.

"- A présent, tu vas faire comme si ce caillou était une proie. Tu vas t'en approcher dans la position du chasseur, et une fois à bonne distance, tu lui sauteras dessus."

Rapace des Monts observa Nuage Obscur, sa position, la façon dont elle marchait, et bondissait. Il remarqua bien sa grimace et se nota de la faire travailler souvent sur cette position. Bien que ce n'était pas le fort des Crépusculiens, savoir chasser toute sorte de proie était très important. Elle bondit efficacement sur le caillou, et son mentor ronronna.

"- Très bien ! Il n'aurait eu aucune chance. Alors maintenant, on va passer à une vraie proie si tu veux. Je te laisse la pister et l'attraper, de la même façon que tu as fait ici. Si tu fais tout comme il faut tu réussiras."

| Cœur Cendré - Nuage Sentinelle |

Rapace des Monts observa sans un bruit son apprentie s'approcher de sa proie. Sa position était parfaite, et elle tua rapidement la proie sans difficulté.

"- Parfait !" S'exclama le guerrier, fier de Nuage Obscur. "Tu n'as plus besoin de mes conseils. Je te propose qu'on ramène le plus de proies possibles tous les deux en chassant ici." Lui proposa-t-il alors.

(On le termine ? Il commence à bien dater)

Le long de la sève gluante, contre l'écorce usée, entre les brins d'herbes dansant suavement, sur les feuilles des petits chênes, par dessus la roche couverte de mousse, la rosée dormait. Les perles transparentes déposées à l'aurore brillaient dans le soleil matinal, l'astre venait à peine de s'éveiller alors que ses premiers rayons osaient déchirer l'horizon. Le ciel dégagé s'était paré d'une couverture aux teintes violacées et dorées, il avait plu toute la nuit, et pourtant, aucun nuage n'osait plus le tacher. L'odeur humide de l'orage restait accrochée dans la végétation et épousait la terre encore meuble, quelques flaques qui s'improvisaient comme miroir de l'azur dérangeaient la vie des habitants des plaines, de petites proies se permettaient cependant de les laper de leurs langues roses, profitant du jour frais qu'enfin l'été leur offrait. Seuls les cris des premiers oiseaux diurnes et la bise douce entre les feuilles vertes perturbait un silence parfait, on voyait les mouettes matinales s'élancer vers l'océan dont l'odeur iodée parvenait jusque là, alors que les chouettes tardives regagnaient seulement leurs nids.

Comme une ombre, ou une part du décors, tu t'étais glissée en dehors de la tanière des guérisseurs quand tout le monde dormait encore. Sans un bruit, tu étais sortie du camp et t'étais rendue au cimetière. Pour fuir des larmes que tu n'avais plus, tu n'étais restée que quelques secondes et, face au vent, tu avais couru dans les landes jusqu'au petit bois. À l'ombre des arbres, tu te laissais voguer dans des mondes chimériques qui n'appartenaient qu'à toi. Exactement trois pleine lunes avaient décoré le ciel depuis sa mort, pourtant, il te semblait que c'était hier, et encore, tu t'autorisais à imaginer qu'il était à tes côtés, que son rire cristallin résonnait dans tes oreilles en déclenchant le tien, que son corps chaud se joignait au tien quand tombait le soir qui vous avait donné vos noms, et pourtant, il n'en était rien. La peine était toujours là, toujours si puissante, toujours si douloureuse, mais malgré toi, alors que l'image de son visage s'estompait, tu t'y habituais contre ton gré.

Pour faire fuir tes démons, tu avais décidé de t'abandonner à une cueillette minutieuse des diverses herbes qui pourraient alimenter la réserve de ta demeure. Ça ne servait pas à grand chose, vous étiez trois à y vivre et peu de chats tombaient malades pendant la saison des feuilles nouvelles, mais celle-ci fuirait vite, alors il valait mieux prévenir que guérir, littéralement. Face à un buisson, tu sélectionnais minutieusement les feuilles qui auraient droit à une place sur l'étalage de fortune, quand un bruit mêlé à une odeur familière te perturba. Agacée, tu fis volte-face pour planter tes yeux d'ambre dans ceux du personnage qui venait perturber ta prétendue paix de si bon matin.

- Bonjour, Nuage de Lumière.

L'apprentie guerrière se tenait droite comme un piquet, l'air fier dont elle ne se détachait jamais sur le visage. Ses yeux d'émeraude perçaient joliment sur son long pelage toujours si impeccable, elle était belle, comme à son habitude. Tu avais connu la femelle pendant sa jeunesse, t'étais amusée de la vie dans la pouponnière à ses côtés, t'étais imaginée apprentie avec elle, avais conté des temps où vous seriez cheffe qui n'existeraient jamais, mais comme tous ceux que tu fréquentais avant la mort de Déclin, tu ne la voyais plus. ta seule compagne était devenue la solitude.