Maison

Eau de Vie a été enlevée par des Bipèdes alors qu'elle attendait des petits. Elle a été adoptée ici par une famille de Bipèdes qui s'occupent bien d'elle. Enfermée, elle n'a pas d'autre choix que de donner la vie à Petite Pastel, Petite Craie, Petit Argile et Petit Fusain dans cette maison, nommés respectivement par les Bipèdes Luna, Marie, Charlie et Léo. Elle-même est renommée Lily.

Bipèdes présents : deux adultes en couple et trois enfants (deux filles et un garçon).
Un aquarium décore la pièce principale ainsi qu'un lapin dans une cage.

≋ EAU DE VIE ≋

Cela faisait que quelques jours qu'elle était là et la guerrière passait ses journées cachées dans un lieu assez étroit pour empêcher que les Bipèdes ne l'atteignent. Epuisée, elle restait constament sur ses gardes, elle ne vivait que la nuit, allant manger par dépit des boulettes infâmes et sèches et parcourant le nid de Bipèdes, tentant de s'y imprégner. Etrangement, la journée, les Bipèdes la laissait plutôt tranquille, si ce n'était les petits qui venaient la voir, l'appelaient puis repartaient. Elle n'avait été ni maltraîtée ni brutalisée comme Reina l'avait été. Son amie de fourrière devait avoir raison ; les Bipèdes n'étaient pas tous pareils, mais Eau de Vie, force de ses croyances et ses pensées Claniques, avait encore du mal à faire confiance. Angoissée, triste et seule, elle ne pouvait s'ôter de l'esprit son Clan qui devait la chercher et croire peut-être morte. Qu'avait dit Nuage Affranchi ? Si il l'avait vue engloutie par le monstre, c'était normal qu'il la croit morte. Néanmoins, la guerrière avait apprit que les monstres ne mangeaient personne, la preuve en était qu'elle était toujours en vie. Et tant que son coeur batterait encore, l'espoir était toujours logé quelque part. Reina lui avait dit de rester forte, de ne pas abandonner. Alors aujourd'hui, elle s'est fait violence ; elle sortirait en journée dans la maison et trouver un moyen de sortir d'ici.
Elle sortit la tête de sa cachette, observa de gauche à droite avant de s'y extirper. Elle avança lentement, sur ses gardes, le nez en l'air à la recherche d'un moindre courant d'air. Entrant dans la pièce principale, elle tomba nez à nez avec la grande Bipède, qui se tourna vers elle et poussa un petit cri surpris. Eau de Vie fit volte face, le pelage hérissé, pétrifiée. La Bipède s'abaissa lentement à son niveau et lui tendit la patte, l'appelant d'une voix fluette. La reine sentit son coeur palpiter à tout allure. Elle n'avait pas prévu de faire ami-ami avec eux, elle voulait simplement sortir. Peut-être qu'elle comprendrait ? Elle esquiva son contact et s'avança précipitament jusqu'à une surface transparente donnant sur un grand carré d'herbe qui ne cessait d'appeler Eau de Vie :
- Laisse-moi sortir ! plaida t-elle alors, les yeux rivés sur la Bipède qui s'approchait. Je dois retrouver ma famille, tu comprends ?
Mais la Bipède approcha sa grosse patte en sa direction. Son souffle se coupa dans ta tranchée et la chatte blanche cracha de peur avant de filer jusqu'à sa cachette à toute allure, le coeur battant. Ce n'était pas aujourd'hui qu'elle y arriverait.

***

Jour après jour depuis sa première sortie, Eau de Vie prenait son temps pour montrer le bout de son museau en journée un peu plus pour tenter la même chose. Si elle avait côtoyé chaque personne de la maison, les deux grands Bipèdes et les deux plus petits, la guerrière ne s'était néanmoins pas laissée approcher. Mais elle passait plus de temps à l'extérieur que dans sa cachette. Et chaque jour en vain, elle miaulait sans relâche devant la fenêtre, mais personne ne la lui ouvrait. Devait-elle faire plus ? Devait-elle se laisser toucher ? Elle en frémissait d'avance. C'était impossible. Comment le pourrait-elle ? Elle n'était pas une chatte domestique, mais à mesure qu'elle ne sentait plus le vent dans son pelage, l'herbe sous ses coussinets, la chaleur de ses camarades, le goût du mulot fraîchement tué... elle avait peur de perdre ces sensations, celles qui la rattachaient à ce qu'elle était vraiment au fond d'elle. Sa propre odeur était à présent différente, ses sens étaient moins affutés, obstrués par les épaisses parois autour d'elle. Alors, elle passait ses journées à regarder le jardin, les oiseaux à l'extérieur, le vent qui soufflait dans les arbres sans qu'elle ne puisse le sentir. Elle était perdue. Désorientée. Et à côté, devait-elle se sentir coupable d'apprécier parfois la chaleur de l'intérieur lorsqu'il pleuvait dehors ? Elle ne pouvait, elle ne devait pas apprécier cela. Alors, elle ignorait ces avantages et se concentrait simplement à partir d'ici. Tout simplement. Mais cependant... son ventre bientôt à terme menaçait une mise bas prochaine et l'empêcherait de faire le trajet jusqu'à chez elle dans tous les cas.

≋ EAU DE VIE ≋

Son ultime espoir de donner la vie à ses petits dans la pouponnière où elle-même avait vu le jour, entourée de son compagnon, de ses parents, de sa soeur et de Nuage Affranchi a bien vite fondu comme neige au soleil dès lors que ses contractions eurent débuté cette nuit-même. Seule, fièvreuse, le visage tiré par la douleur, Eau de Vie se concentrait du mieux qu'elle le put, poussant un à un ses petits. Epuisée, elle laissait dans les moments brefs de répit son esprit vagabonder jusqu'au camp, là où sa force y était. Le doux regard turquoise d'Etoile d'Or qui lui donnait du courage. Les miaulements rassurants de Vodka Ambrée et de Rêve Exalté qui l'incitaient à poursuivre. La présence de l'apprenti guérisseur qui aurait veillé au grain que tout se déroule à merveille. Là, l'angoisse de mal s'y prendre et de perdre un chaton par complication terrorisait Eau de Vie, qui n'avait gère d'autre choix que de continuer à pousser pour en expulser encore un nouveau. Trois petits déjà. Le dernier se faisait attendre et dans un cri de douleur Liqueur lui donna le jour dans un ultime effort. Haletante, elle les observa, la vision troublée par l'effort. Soudain, elle entendit des bruits de pas précipités et lourds. La reine blanche rabattit sa queue autour d'eux, le regard fatigué mais dissuadant les Bipèdes d'approcher leur patte pour oser les toucher. Mais ils s'installèrent non loin, observant la scène de vie, comme émerveillés. Eau de Vie resta méfiante, mais finalement, son attention se tourna vers ses quatre nouveaux-nés qui étaient tout simplement magnifiques. Son coeur se gonfla d'une joie et d'un chagrin entremêlé. Sa gorge se serra d'émotion alors qu'elle se mit à les lécher vigoureusement, dans un élan maternel et protecteur avant de les ramener tendrement vers son ventre.
Approchant son museau contre eux, elle murmura :
- Mes chatons, je vous promets que je vous protégerai jusqu'à ce qu'on rentre chez nous...
Elle les détailla un à un, du haut de leur oreille au bout de la queue, chaque couleur était enivrante, mélangeant plusieurs générations entre une seule portée :
- Petite Pastel, Petite Argile, Petite Craie et Petit Fusain, j'aurai préféré que tout soit différent... mes chéris, n'oubliez jamais d'où vous venez.

La chatonne surveillait les alentours. Elle devait s'assurer de ne pas être vu pour que son plan réussisse. Personne dans les environs, ni sa mère, ni ses frères ou sa sœur qui devait dormir dans leur panier sans doute! Avec une joie et une excitation non dissimulée, elle se prépara. Balança l'arrière train, en fixant sa cible, et bondit comme un boulet de canon droit sur sa victime.

-Je te tiens! Hurla t elle joyeusement en attrapant la grosse patte rose du bipède qui jouait avec elle. J'ai gagné! Ronronna t elle juste après, se lovant au creux de la patte chaleureuse.

Comme elle aimait ses jeux et ses après midi de câlinerie. Comme la vie était belle pour la petit femelle coloré.

≋ EAU DE VIE ≋

- Ft. PETITE PASTEL et PETIT FUSAIN -

Eau de Vie s'était peu à peu habituée à la présence des Bipèdes dans la maison, même si elle restait très distante d'eux, contrairement à ses chatons. Âgés de seulement une petite lune, ils avaient déjà ouverts les yeux et la reine imamculée prenait tout de même plaisir à les voir évoluer, même si un petit pincement au coeur persistait en elle ; ils n'auraient pas dû faire leur premiers pas sur ce sol dénué de terre et d'herbe fraîche. De plus, les voir approcher sans crainte les Bipèdes la mettait mal à l'aise, même si Eau de Vie ne craignait plus pour leur vie comme elle avait pu être avant qu'ils ne se mettent à ramper, elle ne voulait pas qu'ils y prennent goût.
Entrant dans la pièce principale où le soleil commençait à décliner à travers les épaisses parois transparentes, Eau de Vie observa l'extérieur, réprimant un léger soupir. L'air frais de l'extérieur lui manquait terriblement. Elle avait l'impression d'étouffer ici. Heureusement que ses chatons étaient là et égaillaient ses journées, lui passant ses idées sombres et tristes de penser qu'elle ne retrouverait plus jamais les siens et seraient condamnés à vivre ici pour toujours...
"Maman ! couina Petit Fusain, sautant sur sa queue. Je t'ai eue !
Eau de Vie sursauta légèrement avant de se tourner vers son fils :
- Oh ! Tu ressembles déjà un petit guerrier, je ne t'ai même pas entendu arriver !
Petit Fusain émit un ronron sonore avant de tenter de lui immobiliser sa queue.

Petite Pastel suivait son frère. Mais de loin! Elle voulait jouer au chasseur chassé, donc elle le suivait le plus discrètement possible pour lui sauter dessus dès que l'occasion se présenterais.

Mais avant qu'elle ne réussisse sa mission, le petit mâle gris sauta sur leur mère.

-Caca boudin! Jura la chatonne en imitant maladroitement le petit bipède qui venait souvent les voir, je pourrais jamais l'attraper si il reste avec Maman!

Délaissant sa traque, la minette rejoignit le duo près de la fenêtre et se lova contre le poil doux de sa mère.

-Qu'est ce que tu fais? Lui demanda t elle en glissant un œil dehors. La nuit tombait, effrayante aux yeux de la chatonne coloré.

≋ EAU DE VIE ≋

Petit Fusain enserra sa queue tandis qu'Eau de Vie accueillit sa fille au creux de son pelage bien plus duveteux et propre qu'auparavant. A la question de sa fille, la reine sentit sa gorge se serrer. Ce qu'elle faisait ? Qu'est ce qu'elle aurait aimé répondre qu'elle surveillait les chatons d'Erine Glorieuse, ou qu'elle allait manger avec Etoile d'Or... non, là, elle ne pouvait que dire :
- Je pensais à votre père et notre chez-nous, sourit-elle en lui caressant sa petite tête tricolore du bout de sa truffe.
Petit Fusain se redressa alors :
- Mais c'est chez nous ici ! Tu pensais à ici ?
Eau de Vie déglutit, il ne pouvait pas penser ainsi !
- Non, je pensais à notre Clan, qui nous attend...

ⲯ PETIT FUSAIN ⲯ

L'air était calme. Eau de Vie dormait non loin entourée de Luna, Charlie et Marie. Alors, Léo était tout seul à s'être extirpé de la sieste après la têtée, profitant d'une accalmie pour s'accaparer à lui tout seul l'attention des petits Bipèdes. Eux, visiblement ravis de pouvoir jouer avec Petit Fusain, se mirent à agiter des bouts de ficelles et des petites balles pour amuser le chaton. Cela réussit sans la moindre difficulté et Léo laissa ses pupilles se dilater, concentré, jusqu'à ce qu'il saute maladroitement sur la main d'un des petits Bipèdes, qui poussa un petit cri surpris, sans effrayer le chaton. Il savait qu'il ne fallait pas mettre les griffes, sa mère le lui rappelait toujours. Obéissant, Léo faisait alors toujours attention à ses faits et gestes et même si la féline blanche ne lui avait rien dit au sujet des Bipèdes, il était évident pour lui qu'il fallait faire de même. L'affection à leur égard était telle qu'il n'avait aucun souci à intégrer ces Bipèdes comme des membres de sa famille au même titre que son frère et ses soeurs. Pourtant, Eau de Vie lui rappelait sans cesse qu'il se méprenait ; sa vraie famille était des chats, eux, et ceux restés dans ce fameux "Clan de l'Aube". Notion abstraite pour Petit Fusain, qui d'ailleurs, préférait le court nom de Léo, et n'arrivait pas à imaginer d'autres chats qu'eux, les attendant au-delà de cette fenêtre donnant sur ce jardin qui lui semblait infini. Il n'était pas le seul à apprécier cette vie, Luna également. Alors que sa mère avait toujours sur son visage cet air... triste. Nostalgique. Ce n'était pas qu'il ne la croyait pas, mais il avait simplement du mal à mettre des images concrètes sur ses mots. Pour lui, ils étaient bien ici, alors pourquoi vouloir partir ? L'extérieur n'avait pas l'air attrayant et semblait un lieu emplis de risques et de dangers pouvant subvenir partout. Ce n'était pas au goût de Léo.

Des mains virent soudainement emprissoner le chaton, qui ne s'en affola pas, au contraire, et le soulèvèrent pour que le petit Bipède le serre contre lui. Petit Fusain ronronna alors à son tour, appréciant la tendresse. Le petit fit passer le chaton au main de la petite qui fit de même avant d'entendre des voix d'inconnus accompagnés de ceux familiers des grands Bipèdes dans l'entrée. Léo ne se posa pas de question. Ce n'était pas la première fois que d'autres Bipèdes qu'il ne connaissait venaient et jouaient avec eux. Le groupes d'adulte arrivèrent dans la pièce principale ; ils étaient trois, dont une petite Bipède. Cela réveilla Eau de Vie ainsi que son frère et ses soeurs. Puis la petite Bipède donna Léo à l'un des inconnus. Léo ronronna encore plus, content de rencontrer une nouvelle personne. Mais du coin de l'oeil, il vit sa mre lentement se diriger vers eux, méfiante :
" Ne t'inquiète pas maman, il me caresse juste ! lui miaula t-il alors.
- Fais attention quand même, répondit-elle.
Les Bipèdes se tournèrent vers elle et l'un des inconnus tenta de la toucher mais elle se recula en feulant vivement, qui dissuada le Bipède de prolonger son geste. Léo savait qu'elle n'était pas très tendre avec eux, mais elle se trompait. Tout allait bien. Léo fut passé de mains en mains avant que la boite que l'un deux tenait ne s'ouvrit devant lui. Curieux, Léo s'approcha en reniflant l'intérieur et s'y aventura, dans l'esprit du jeu. Soudain, le bruit sourd de la grille qui se referma derrière lui le fit sursauter et Léo se retourna, constatant qu'il était coincé :
- Qu-Quoi ?
Avant que sa cage fut soulevée du sol, il vit sa mère en face de lui, ses yeux écarquillés par la stupeur. Puis, dans les airs, il se sentit balancer légèrement de gauche à droite, instable sur ses pattes, laissant alors alors la peur l'envahir sûrement pour la première fois de sa vie :
- Maman ! s'écria t-il, horrifié.
- Petit Fusain ! Non ! l'entendit-il hurler en contre-bas sans relâche. Reviens ! Rendez-le moi, coeurs de renards ! feula t-elle ensuite.
Il ne vit rien de la scène mais entendait distinctement la fureur d'Eau de Vie dans sa voix déraillée par l'angoisse tangible à l'idée de perdre l'un de ses petits. Il entait son frère et ses soeurs l'appeler également, en vain. Léo se sentit transporter vers l'entrée avant que la porte ne se ferme derrière lui dans un claquement sourd. Léo sentit son petit coeur battre la chamade, replié au fond de sa cage, observant brièvement l'extérieur, aveuglé par le soleil. Que lui arrivait-il ? Où était sa famille ? Où allait-il ?
Je vais revenir, c'est certain ! Ils ne sont pas aussi méchants que maman le prétend ! tenta t-il de se rassurer mais la peur couvrait le reste de son courage et les larmes de détresse se mirent à perler aux coins de ses yeux. Il les ferma alors, couvrit ses oreilles de ses pattes et attendit que ce calvaire se finisse.

***

"Petit Fusain ! Non ! Reviens ! Rendez-le moi, coeurs de renards !"
Le feulement catastrophé d'Eau de Vie ne réalisa pas son souhait, bien au contraire. L'un des petits Bipèdes tenta de la caresser pour l'apaiser mais Liqueur lui griffa sa patte, horrifiée à l'idée que l'un de ses petits puissent disparaître aussi simplement que ça. Poussée des ailes, elle se jeta contre celui qui tenait la boite pour lui lacérer les jambes, le Bipèdes cria et un autre attrapa Eau de Vie par la peau du cou en hurlant à son tour contre elle. A moitié immobilisée, elle s'agita comme elle put, feulant et griffant tout ce qu'elle pouvait toucher. Ces Bipèdes n'allaient pas lui enlever son chaton ! Ils ne le pouvaient pas ! Ils n'avaient pas le droit ! Alors qu'elle se débattait contre deux Bipèdes adultes, qui supportaient morsures sur griffures, elle vit du coin de l'oeil son fils dans la boite dans laquelle elle était elle-même arrivée ici passer le pas de la porte principale :
- Non ! Lâchez-moi ! Ne pars pas !
Où l'emmènaient-ils ? Qu'allaient-ils lui faire ? Reviendrait-il ici ? Le reverrait-elle ? Tout un tas de questions traversèrent son esprit, qui lui donna le tournis. Finalement, les Bipèdes la relâchèrent et Eau de Vie accurut jusqu'à la porte fermée et se mit à gratter après sans relâche, jusqu'à s'en user les griffes et d'hurler sa disparition soudaine. Une immense rage mêlé à un immense chagrin l'éprit de tous les côtés et Eau de Vie s'effondra devant la porte, secouée par des sanglots incontrôlables. Son fils avait disparu aux mains de Bipèdes. Seul le Clan des Etoiles savait ce qu'il allait lui arriver. Il était hors de question qu'il les rejoigne si tôt. Cette pensée acheva de l'accabler. Une petite boule de poil se lova contre elle et vit Luna l'observer de ses grands yeux bleus semblables à ceux de son père. Cela lui donna un élan de peur qui se transforma en courage. Elle se retourna vers Petite Pastel, Petit Argile et Petite Craie, qui la regardaient, interloqués. Eau de Vie sentit son coeur se gonfler d'adrénaline et d'amour à leur égard :
- A partir de maintenant, tout sera différent. On va rentrer chez nous. Vous m'entendez ? Je ne veux plus vous perdre.

≋ EAU DE VIE ≋

- ft. Whisky d'Ether -

Comme si les Bipèdes avaient lu dans ses pensées, Eau de Vie avait l'impression qu'ils prenaient trois fois plus de précautions lorsqu'ils ouvraient et fermaient la porte principale ou encore les fenêtres. A partir de maintenant, Eau de Vie refusait catégoriquement que ses chatons s'approchent des Bipèdes et les laissaient dans le placard où elle avait mis bas et les incitaient à y rester. De toute façon, terrifiés depuis la disparition de Petit Fusain, la chatte blanche pouvait comprendre qu'ils n'aient plus envie de s'en approcher, au risque de partir à leur tour. Et c'était son pire cauchemar. Elle savait qu'elle ne reverrait plus Petit Fusain si elle ne sortait pas d'ici. Sortie en fin de journée, l'échien hérissée, sur ses gardes, Eau de Vie s'approchait en direction de la gamelle où l'un des Bipèdes y avait déposé les crottes incipides qu'elle devait manger pour survivre ici.
Elle passa devant la baie vitrée, plus concentrée devant elle que derrière. Cela faisait longtemps qu'elle avait arrêté de regarder dehors avec nostalgie. Mais lorsqu'elle passa brièvement son regard devant la fenêtre, son coeur loupa un battement. Son corps s'immobilisa, ses yeux s'écarquillèrent. Rêvait-elle ? Devenait-elle folle ? Pourquoi Whisky d'Ether se trouvait-il là, derrière cette fenêtre, dans le jardin ? Elle devait en être certaine. Elle s'approcha prudement, interloquée :
- Whisky d'Ether ? s'enquit-elle, consciente qu'il ne pouvait pas l'entendre.

Whisky d'Éther s'était une fois encore éloigné du territoire du Zénith et des tensions qui y régnaient, de plus en plus désireux de partir en dépit de son devoir à l'égard de son apprenti, et de son envie de mener cette mission à bout, quoiqu'en pense le concerné. Danse de l'Univers était morte, et la Tribu s'éloignait jour après jour de ce qu'elle avait pu être à l'origine, ce lieu d'apaisement où tout était permis, tout particulièrement l'épanouissement personnel. Ses rêves de voyage revenaient de plus belle, et s'il n'aurait su se plaindre d'une façon ou d'une autre des situations qu'il traversait, celles-ci n'étant rien de plus que de nouvelles expériences à raconter, il n'en avait pas moins envie d'ailleurs. Il n'allait pas bien loin ceci dit, il serait bientôt père et était curieux de voir ce que cela lui ferait. Arpentant les rues du hameau sans but, croisant de vieilles connaissances et s'intéressant à l'impact qu'avaient sur place les crépusculiens exilés, il regardait parfois par les fenêtres des maisons pour apercevoir de nouveaux visages. Mais le visage sur lequel il finit par tomber n'avait rien de nouveau, c'était au contraire l'un des premiers qu'il avait connus.

- Eau de Vie !?

S'étonna-t-il. Il avait entendu dire qu'elle s'était faite enlever par des bipèdes, mais la rencontrer soudain le surprenait grandement, et un large sourire illumina son visage.

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≋ EAU DE VIE ≋

Elle ne rêvait pas ! Tout était bien réel ! Whisky d'Ether, qui semblait tout aussi éberlué que la chatte blanche, se tenait bien là, devant elle, vivant ! Elle regarda autour d'elle avec précipitation vérifiant qu'aucun Bipède ne l'avait vu, refusant qu'il puisse être attrapé ici à son tour. Elle sentit son coeur faire des loopings dans sa cage thoracique tellement elle se sentit heureuse, soulagée et angoissée de le revoir ici. Peut-être qu'il était source d'un espoir encore insoupçonné ? Peut-être que...
Face à son sourire, elle eut peur qu'il ne comprenne pas sa détresse et la chatte blanche se releva sur ses pattes arrières, moulinant frénétiquement de ses pattes avants sur la vitre, implorant, faisant crisser ses griffes sur la baie vitrée :
- S'il te plaît, Whisky ! Préviens mon Clan ! Dis leur que je suis vivante mais j'ai besoin d'aide pour sortir !
Elle s'arrêta, sentant sa gorge se serrer et le fixa intensément, sachant pertinement qu'il ne l'entendrait pas. Néanmoins, elle espérait qu'il comprenne le sens de ses gestes. S'il te plaît... ils ont enlevé mon chaton...

≋ EAU DE VIE ≋

- ÉVASION ft. WHISKY D'ÉTHER, VODKA AMBRÉE et QUÊTE D'EXCELLENCE -

Depuis que Whisky d’Ether avait quitté son champ de vision, Eau de Vie ne pouvait que se résoudre vivre dans la peur, la crainte, l’appréhension mais également l’espoir, la joie et le soulagement. Deux sentiments contradictoires entre-mêlés puisqu’elle ne savait si son frère avait compris la situation dans laquelle elle se trouvait ni même s’il avait deviné ses demandes à travers la vitre épaisse qui les séparait. Comme un lion en cage, Eau de Vie faisait les cent pas devant la baie vitrée, attendant qu’il revienne. Allait-il revenir ? Les chats du Clan le croiraient-ils ? Il était parti de son plein gré, avait renoncé à sa loyauté et à ses droits de guerrier Aubiste. Elle espérait que sa sœur ou sa mère puissent l’appuyer car elles seules le connaissaient par cœur. Ainsi qu’Etoile d’Or. Son compagnon, animé par un semblant d’espoir, pourrait faire confiance à Whisky d’Ether. Elle inspira profondément, alors que ses pattes tremblaient. Chaque jour, chaque minute passée ici mettait le cœur de Liqueur à rude épreuve. Dès que la porte s’ouvrait, dès qu’un Bipède s’approchait dangereusement de ses chatons, elle ne vivait que dans le cauchemar que l’un d’eux rejoigne Petit Fusain. Elle ne dormait plus, elle était épuisée qu’être constamment à l’affût. Et lorsqu’elle ouvrait les yeux, constatant avec horreur qu’elle s’était endormie quelques instants, elle manquait la crise de panique. Elle ne pouvait plus vivre ainsi. Ses chatons connaissaient une mère surprotectrice et angoissée qu’elle s’était pourtant jurée de ne jamais être. Cependant, les circonstances étaient qu’elle ne voyait pas d’autre solution.
Un mouvement vint la sortir de ses pensées. Elle écarquilla les yeux. Un coucher de soleil séparait la dernière fois qu’elle avait vu son frère et le lendemain, la reine ayant passé toute la nuit devant éveillée à attendre désespérément quelque chose. Soudain, elle vit à travers la vitre trois chats. Whisky d’Ether il avait ramené Vodka Ambrée et Quête d’Excellence ! Une marée de soulagement et de reconnaissance vint la percuter si fort qu’elle faillit vaciller alors qu’elle croisait le regard aveugle de sa sœur. Elle se redressa aussitôt, piquée au vif et bondit vers le placard où ses chatons étaient. Elle les réveilla, les poussant du museau :
« Levez-vous. On rentre chez nous. »
Surpris, les trois petits ne firent pas plus de commentaire et suivirent docilement leur mère, qui analysait l’intérieur. Un seul Bipède était debout, les autres dormaient encore. C’était le moment. Elle connaissait par cœur les remues ménages de la maison. Le matin souvent, c’était toujours le grand Bipède qui partait tôt avant les autres, c’était donc le bon moment. Elle les positionna à vers l’entrée, cachés et revint trouver sa famille et son amie. Elle leur fit signe d’attendre près de la porte, tentant de leur indiquer la direction d’un geste de queue. Puis, retourna se cacher avec ses chatons. L’attente fut terriblement longue, son cœur battait à tout rompre dans ses tympans, faisait vibrer son corps mais l’adrénaline irradiait ses entrailles avec une détermination folle. Elle n’attendait qu’une seule chose ; bondir à l’extérieur. Seule, cela n’aurait pas été possible, porter les chatons et s’enfuir en même temps était pratiquement impossible. Là, c’était tout de suite nettement envisageable :
« Ecoutez-moi bien, lorsqu’il ouvrira la porte, vous devrez courir d’accord ? Mon frère, ma sœur et une amie vous attendront dehors. Laissez-vous prendre et partir avec eux. Faites-leur confiance, ils vous ramèneront chez nous. Tout ira bien, mes chéris, ajouta-t-elle en les voyant perturbés par ces indications et leur lécha l’oreille à chacun, le cœur serré.
Elle entendit les pas lourds et précipités du Bipède descendre les escaliers. Elle se tendit, guettant le moment propice pour bondir. Le Bipède enfila ses espèces de protection pour ses pattes arrières et ouvrit la porte brutalement. C’était le moment ! Eau de Vie attrapa Petite Craie et poussa les deux autres hors de leur cachette. Le Bipède poussa un cri surpris et s’immobilisa de stupeur lorsqu’il vit Whisky d’Ether se planter entre l’entrebâillement de la porte. Profitant de ce moment d’égarement, Eau de Vie passa vivement à son côté et continua à pousser ses chatons à l’extérieur. L’air frais qui lui manquait cruellement depuis toutes ces lunes lui donna un second élan de combativité et bondit en direction de sa sœur et de Quête d’Excellence. L’une et l’autre attrapèrent un chaton et rebroussèrent chemin. Eau de Vie s’arrêta et se retourna vers son frère, qui, heureusement, arrivait à toute vitesse vers elle. Même si elle ne put lui parler à cause de sa fille qu’elle tenait entre ses crocs, elle lui lança un regard brillant de reconnaissance. L’amour qu’elle lui portait avait toujours été viscéral. Tout les deux se faisaient confiance et sa sœur l’avait toujours admiré pour ses choix de vie pleinement assumés. Aujourd’hui, le geste qu’il lui avait fait dépassait l’entendement, risquant sa vie pour elle, et la chatte blanche ne pouvait que le remercier éternellement. Elle se frotta brièvement à lui avant d’entendre le Bipède hurler au loin en courant vers eux, alors le frère et la sœur bondirent à leur tour hors du jardin, laissant à Eau de Vie savourer à nouveau la sensation de l’herbe sous ses coussinets et le vent frais caressant sa fourrure. Ainsi que la hâte de retrouver son Clan qui laissait ses pattes la guider.

ⲯ NUAGE CENDRÉ ⲯ

- RUISSEAU & FUSAIN -

Un soir parmi tant d'autres, Nuage Cendré quitta le camp après une dure journée d'entraînement. Déterminé à continuer à s'investir au mieux pour son Clan, il n'oubliait cependant jamais sa seconde famille, qui l'accueillait à pattes ouvertes chaque nuit. Nuage Cendré cheminait tranquillement, laissant ses pensées dériver vers Nuage de Ruisseau. Cette dernière s'était bien plus rapprochée de lui depuis leur première discussion. Ils chassaient souvent ensemble et la minette en profitait pour écouter ses histoires et apprendre diverses informations sur son mode de vie qui semblait passionner la petite novice. Nuage Cendré en fut flatté et surprit, peu habitué que des chats s'intéresse autant à son mode de vie. Même sa cousine l'avait étonné. Mais il était heureux de se sentir soutenu malgré tout ce que pouvait représenter ce choix-là :
"Coucou ! émit une voix familière près de son oreille.
Fusain sursauta et fit volte-face avant de reconnaître le pelage moucheté blanc de son amie, qui frétillait des moustaches d'excitation. Nuage Cendré soupira de soulagement :
- Tu m'as fait peur ! Mais que fais-tu ici ?
Ils étaient loin du camp, sa maison était visible derrière le jardin :
- Bah, je suis venue voir d'un peu plus près où est ce que tu dors ! Je voulais mettre un peu des images sur les mots qui tu me décries souvent.
Il paniqua, peu habitué à ce que des chats viennent toucher d'aussi près son intimité :
- Je... je... tu es sûre... ? Il y a un chien, et...
- Evidement. Et tu m'as dit que ton chien n'était pas méchant, alors c'est bon !
Sans attendre, elle sauta sur la rambarde qui délimitait le jardin et contempla la vue. Nuage Cendré sauta près d'elle, le cœur battant. Qu'allait-en penser ? Qu'allaient en penser ses Bipèdes et les autres ?
- Woah ! Il est grand, ce nid ! Et ce jardin aussi. Tu dois bien t'amuser. Ah, ça doit être... "Patty" c'est ça ? fit-elle en désignant le chien couché sur la terrasse.
- Oui... fit Fusain, peu assuré.
Elle sourit et sauta dans le jardin et scruta tout autour. Paniqué, Léo sauta à son tour et se planta devant elle :
- Maintenant que tu as vu... tu peux y aller, le Clan va s'inquiéter, il fait nuit et...
- Non ! fit-elle, comme offusquée. Ça ne va pas ? Maintenant que je suis là, je veux passer une nuit ici.
Il se mordit la lèvre, il en était sûr. Cette idée ne s'était pas délogée de sa tête :
- Vraiment... ?
- Bien sûr !
Il jeta un œil vers la fenêtre, où du mouvement était visible, signalant la présence de ses Bipèdes. Il hésita, mais voyant Nuage de Ruisseau trottiner vers l’avant, queue bien droite. Patty se redressa aussitôt et fila vers elle. Farouche, Ruisseau s’hérissa par réflexe et feula sur le chien, l’incitant à ne pas s’approcher :
- Il ne te fera rien ! s’exclama Léo en accourant près d’eux.
Nuage de Ruisseau força à se détendre mais resta méfiante, laissant le chien la renifler avant que ses yeux ne se mettent à briller :
- Je n’ai jamais approché un chien d’aussi près !
Léo soupira de soulagement et guida doucement son amie vers la fenêtre, moulinant des pattes sur celle-ci, montrant à ses Bipèdes qu’il était là. Ils l’ouvrirent instantanément et furent surpris par la présence de Nuage de Ruisseau :
- Voici Nuage de Ruisseau, une amie du Clan, fit-il comme s’ils pouvaient le comprendre. Elle veut rester une nuit ici. Est-ce-que…
Pas le temps pour Nuage de Ruisseau, qui bondit à l’intérieur, les oreilles aux aguets, inspectant tout autour d’elle, s’exclamant sur sa surprise de constater à quel point un nid de Bipèdes était aussi étrange et différent qu’elle ne l’aurait pensé. La nuit tombée, Nuage de Ruisseau la passa à découvrir chaque recoin de la maison, à comprendre comment les chats domestiques vivait, à suivre son ami sur son mode de vie, à connaître Mirabelle et Patty, ainsi que les deux Bipèdes qui composaient cette joyeuse et étrange famille. Et surtout, à apprendre à apprécier cette nouvelle vie.
Le matin, ils rentrèrent au camp tout les deux, et Nuage de Ruisseau avait bien du mal à ne pas s’enthousiasmer sur son expérience de la veille, qu’elle n’oublierait probablement jamais… et cette idée mettait Nuage Cendré mal à l'aise. Cependant, en même temps, il ne pouvait s'empêcher de s'imaginer vivre avec elle sous le même toit, le soir...

ⲯ NUAGE CENDRÉ & RUISSEAU ⲯ

Le temps s'était lentement égrainé depuis la première fois où Ruisseau était venue avec Nuage Cendré dans la maison de Bipède. De plus en plus, elle l'accompagnait, ce qui déplaisait de moins en moins au jeune chat, qui s'était habitué à sa présence, et son sentiment de malaise n'était désormais plus qu'un lointain souvenir. Son attachement à la petite chatte était à présent bien plus fort, passant de nombreuses soirées à parler, allongés sur le tapis duveteux du salon, observant les étoiles par la baie vitrée, parlant de leur vie, de leur point de vue sur celle-ci... des conversations tantôt profondes, tantôt légères, qui approfondissaient leur relation, devenant bien plus de simples amis.
Dès l'aube de ce jour-là, Nuage Cendré s'étira longuement avant de grignoter quelques croquettes et de se planter devant la fenêtre, comme chaque matin. Il regarda à son côté et ne vit pas Ruisseau, qui, habituellement, l'accompagnait pour rentrer. Etonné, il se retourna et la vit non loin, assise, le visage grave mais résolu :
- On... on y va ? tenta t-il.
Comme il se l'imaginait, Nuage de Ruisseau soupira en secouant la tête :
- J'ai bien réfléchi.
Son coeur fit un bond dans sa poitrine. Pas ça...
- J'ai bien réfléchi, reprit-elle, et je ne reviendrai pas parmi les nôtres.
Il l'observa, peiné :
- Tu... tu en es certaine ? Sans prévenir personne ? Ta mère, ta fratrie, tes amis, Etoile Agile... tous nos camarades...
- Les adieux ne servent à rien, ils font perdre du temps et de l'énergie. Ils vont tenter de me retenir ou de me faire culpabiliser. Je n'en ai pas envie.
Nuage Cendré ne pouvait s'empêcher d'imaginer Pelage de Noisette, actuellement au plus mal dans la tanière des guérisseurs. Leurs relations étaient compliquées entre elle et il savait à quel point cette nouvelle pouvait lui faire du mal. Elle n'en avait pas besoin, mais elle était dans le droit de savoir ce que deviennait ses enfants :
- Ne cherche pas à m'en dissuader, fit-elle d'un ton ferme.
- Je n'aurai pas cherché à le faire, tu me connais... je respecte ta décision, je ne veux que ton bonheur. Si tu penses le trouver ici, alors j'en suis le plus heureux. Je suis mal placé pour juger ton choix, Ruisseau. J'aimerai... simplement informer ta mère, si tu me le permets, ajouta t-il, mal à l'aise.
Il vit une ombre traverser le regard de son amie, puis elle se détourna en haussant les épaules :
- Fais comme tu veux.
Puis, elle sortit de la pièce, comme si de rien n'était, laissant Léo seul avec le coeur lourd de cette nouvelle.

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