Les jours, suivit des lunes, avaient passé à une allure fulgurante. L'ancien guérisseur avait presque oublié ce que cela faisait, de se retrouver en compagnie de quelqu'un. Capucine était une ancienne domestique, abandonnée par ses bipèdes, elle avait rencontré Noix dans une grange, détruite par la suite par une tempête. Ils avaient vécu seul, l'un avec l'autre, l'un pour l'autre, jusqu'à la mort du matou brun. C'était ce jour là qu'Ivresse l'avait rencontré, prenant alors soins d'elle, il avait retrouvé cette notion de clan, nourrir un camarade, le protéger, et il ne s'était jamais autant rendu compte de la difficulté que cela impliquait. Ce jour fut le début d'une nouvelle histoire, lorsque les cris de la féline résonnèrent dans l'air du lac. Ils avaient construit deux tanières de fortunes ici, au creux d'un rocher, afin d'être protéger du froid et des intempéries. Ivresse se précipita, ses instincts de guérisseurs ayant prit le dessus bien avant le début de la naissance, il alla chercher quelques feuilles qu'il avait ramassé et caché dans un creux que formait la terre prêt du lac. Ce n'était clairement pas un endroit idéal, mais c'était le mieux qu'il avait trouvé.
Rejoignant en quelques foulé Capucine, Ivresse se pencha vers elle, là rassurant d'un regard, déposant ses pattes sur le ventre de la solitaire. Ce serait une longue naissance, le guérisseur savait que les chatons étaient nombreux et il espérait de tout son coeur que tout se passe bien.
Après un énième cris, six boules de poils étaient rassemblés contre le ventre de leur mère, fatiguée mais plus heureuse que jamais, la jeune reine passa un coup de langue sur chacun des chatons avant de soupirer.

-Je dois les nommer, maintenant, n'est-ce pas ?

Le guerrier hocha la tête jusqu'à ce qu'un voile de tristesse vint se poser sur son regard pourtant si joyeux auparavant.

-On avait plein de projet, des idées, des envies... Je ne pourrais plus rien accomplir désormais.

Ivresse s'approcha, posant sa queue sur les épaules de la mère.

-Bien sure que si tu réalisera de nouvelles choses, je t'aiderais, c'est promis.

Capucine esquissa un sourire avant de regarder le premier chaton. Une petite chatonne brune avec des tâches un peu plus foncé.

-Qui es-tu ? Qu'est-ce que tu fais ?

Ses premiers mots, après deux jours dans un silence assourdissant, Capucine avait enfin ouvert la gueule pour l'interroger, bien que c'était des question auquel il ne savait pas réellement quoi répondre. Qui était-il ? Que faisait-il ici ? Il posa son regard bleu sur la féline grise et rousse avant de baisser la tête. Elle eu l'air de comprendre, et pourtant son regard vert resta posé sur lui, attendant une réponse.

-Tu peux m'appeler Ivresse. Finit-il par souffler. Je viens d'au-delà du chemin du tonnerre, j'étais avec les claniques qui s'y sont installé. Voyant un geste de recul de la part de l'inconnue, Ivresse se recula afin de la rassurer. Ne t'en fais pas, je suis partis de mon propre gré. Je ne me suis pas fait bannir.

Capucine resta un instant silencieuse, sur la défensive, avant de s'adoucir, restant tout de même sur ses gardes.

-Et pourquoi tu es partis ?

-Je n'étais plus à ma place.

Capucine eu un instant l'air de comprendre, avant de froncer le museau.

-Mais... Tu n'as pas laissé des félins là-bas ? Qui s'inquiète pour toi ?

Ivresse baissa un instant les yeux, qui s'inquiétait ? Il savait qu'Innocence Oublié devait lui en vouloir à mort, comme Fléau Nocturne d'ailleurs, et son départ n'avait pas dû tant étonné sa compagne. Ses enfants, eux, étaient pour la plupart partit dans un autre clan.

-Peut-être ma soeur, mais je suis sure qu'elle comprend, au fond.

Finit-il par miauler dans un léger sourire.

-Tu avais une soeur ?

La question de la future reine était emprunte de curiosité et de douceur, la féline s'était complètement détendu.

-Oui. Miaula-t-il dans un léger ronronnement. Idylle Toxique. C'est une vraie aventurière, elle est sage et honnête, mais surtout très libre ! Elle a du mal à écouter les règles.

Pour la première fois, Capucine sourit sincèrement. Le regard éblouissant.

-Je crois qu'elle m'aurait plut.

Ces mots firent chaud au coeur de l'ancien guérisseur qui hocha la tête avant de se détourner afin d'aller chasser.


Le regard brillant de la féline se détacha alors de la première chatonne avant de le poser sur la deuxième femelle. Brune constellé de roux, elle rampait afin d'atteindre giron de sa mère. Ivresse ne détacha pas son regard d'elle, arrachant un ronronnement à la mère.


-Tu ne m'as jamais parlé de ta compagne. Tu l'as évoqué, mais jamais réellement parlé.

Cela faisait déjà une lune que le guérisseur vivait et s'occuper de Capucine, il avait prit l'habitude de ses questions, elles venaient toujours quand il s'y attendait le moins. Là, alors qu'il mâchait des feuilles dans l'optique de faire un cataplasme, il se tût un instant. Parler de Braise du Ciel était toujours aussi étrange, sa soeur et sa meilleure amie lui manquait parfois affreusement, mais l'absence de la guerrière rousse et blanche était pire encore que le reste.

-Il n'y a rien à dire.

Répondit-il alors froidement. Mais la future mère voyait les choses bien autrement, ce n'était pas la première fois qu'il éludait ou ignorait des questions qu'elle lui posait, alors elle attendit, ses grands yeux verts posé sur lui sans cillé, et elle resta ainsi, jusqu'à ce qu'Ivresse soupire de découragement et se mette à parler.

-C'est... Elle est la personne la plus cher à mes yeux. Je me suis toujours focalisé sur mon devoir de guérisseur, les règles et les concessions que cela impliquait, mais elle a tout détruit au moment où je l'ai rencontré. Elle était d'une grande douceur sans avoir besoins de dire quoique ce soit, elle était patiente, compréhensive, mais savait parfaitement ce qu'elle voulait et ne se laissait pas démonter.

Il s'arrêta avant de rire légèrement, secouant la tête face au regard écarquillé de Capucine.

-Et pourtant tu l'as laissé.

Miaula-t-elle, sa remarque ressemblant plus à une question, bien qu'elle connaissait déjà la réponse.

-Et pourtant je l'ai laissé.

Confirma-t-il alors d'un hochement de tête avant que le silence ne revienne.


Le regard du guérisseur s'écarquilla un peu plus mais la jeune mère ne lui laissa pas le temps de dire quoique ce soit. Son regard passa sur le troisième chaton. D'un gris clair, il était assombrit par un gris plus foncé, surmonté d'un jolie brun foncé formant des tâches sur son corps.


Après Idylle, Capucine avait posé des questions sur un peu, et Ivresse avait passé un long moment à lui expliqué le fonctionnement d'un clan, son rôle et pourquoi il était partit. Il lui avait parlé de son frère et de sa soeur décédé, de ses neveux, ses nièces, ses cousins ses parents et ses enfants, ses amis, la confiance, sa vie en général, sans vraiment rentrer dans les détails. Mais la curiosité de la solitaire était infini et bien qu'il en connaissait chaque jour un peu plus sur elle, elle trouvait toujours des choses à déterré.

-Pourquoi tu n'es pas partit plus tôt ? Tu n'avais pas vraiment de raison de rester après tout. Enfin, tu avais ta famille, mais elle y est toujours, alors pourquoi ne pas être partit plus tôt ?

Triant les dernières feuilles d'ortilles, l'ancien clanique réfléchit quelques instants à ce qui l'avait retenu avant de soupirer, encore.

-Je crois que c'est Innocence Oubliée. Ma meilleure amie. Il marqua une pause afin de trouver ses mots. Elle a toujours été un inspiration. Entouré de souffrance, pourtant elle avançait, elle essayait, elle se battait pour survivre et servir son clan. Je me disais que si elle pouvait le faire, alors j'y arriverais également, je pourrais faire comme si tout allais bien et servir mon clan du mieux que je le pouvais.

Le regard de Capucine envoya une question silencieuse que pourtant le guérisseur entendit.

-Ce n'était qu'une illusion. Ce n'est pas une vie.


Une nouvelle fois, le regard de Capucine se détacha afin de passer au quatrième chaton, d'un roux clair surmonté d'un brun foncé, il fit frissonner la mère qui devait voir en ce chaton le parfait mélange entre elle et son compagnon.


Le silence de cette fin de journée était plus apaisant que jamais, le soleil déclinait et les esprit s'apaisaient. Le regard dans le vide, Ivresse retint presque un grognement lorsque Capucine brisa l'harmonie du vent dans l'herbe haute.

-Tu ne m'as jamais dis ce qui t'avais motivé à partir.

L'ancien lieutenant releva légèrement la tête, dévisageant ainsi la futur mère.

-Quoi ? Tu m'as dis pourquoi tu étais resté, mais pas ce qui t'as décidé à partir.

Ivresse leva les yeux au ciel en secouant la tête, presque exaspéré par la curiosité maladive de la féline, mais il répondit quand même.

-J'avais un ami, du clan de la Nuit, c'était... L'un des félins desquels j'étais le plus proche. Il est devenu lieutenant dans la Nuit, et pendant la migration il a prit le rôle de chef. Il a toujours été d'une grande douceur, pacifique, il voulait le bien tout autour de lui, c'était l'une des personnes les plus gentille que j'ai rencontré. Il marqua une légère pause, essayant de contenir ses émotions. Mais il ne voulait pas devenir chef, il voulait sa liberté, il voulait vivre, mais il était tellement loyal, tellement bon, qu'il l'est devenu, il a mis sa vie entre parenthèse pour son clan. Et... Je ne voulais pas de ça. Je ne voulais pas faire de choix.

Capucine hocha la tête, ne faisant aucun commentaire. Juste le regard triste et pourtant brillant de bonheur. Ivresse ne chercha pas vraiment, il ne souhaitait pas comprendre ce qu'il se passait dans son esprit.


D'un geste de la queue, Ivresse arrêta son amie avant que son regard ne se pose sur les deux derniers chatons.

-Je... Je ne comprend pas.

Miaula-t-il la gorge serrer alors qu'il observait les quatre chatons qu'elle avait déjà nommé.

-C'est grâce à eux que tu es là. Si tu n'avais pas eu la vie que tu as eu, alors jamais nous nous serrions rencontré, et ces félins sont ceux qui ont marqué ton existante. Ces noms, ils représentent tout e que j'ai toujours voulu pour mes enfants, la douceur, la patiente, la loyauté, la force et la liberté. Je suis sure qu'ils leur porteront chance.

Ivresse resta bouche-bée, incapable de prononcer le moindre mot. Mais il n'avait finalement pas besoins.

-Il me manque deux noms encore, pour l'apaisement et le courage.

Ivresse releva le regard vers la mère qui sourit.

-Me regard pas comme ça, tu m'as promis que tu m'aiderais à les élever, que tu les élèveraient comme tes propres petits.

Et c'était la réalité, comment aurait-il pu refuser cette demande en même temps ? Il soupira légèrement, secouant la tête.

-Tu m'as parlé du champ, de chez tes anciens bipèdes, tu me disais que c'était l'endroit le plus apaisant que tu n'ai jamais vue.

-Un champ de tulipe. Confirma la jeune féline en posant son regard sur la chatonne dont le pelage comportait trois nuances de brun. Puis elle posa son regard sur le dernier petit mâle, brun également. Noisette.

Miaula-t-elle dans un souffle, ses paroles rejoignant ainsi le ciel. Elle marqua une pause, reposant sa tête sur sa litière, finissant par s'endormir dans un ronronnement. Ivresse, lui, resta assis prêt des chatons, les observant sans pouvoir détourner le regard.

Les chatons avaient finit par s'endormir au plus grand bonheur du père qui était épuisé. Le soleil commençait à se lever et il n'avait pas fermé l'oeil de la nuit. Il n'avait pas voulu réveillé son amie qui était tout aussi fatiguée, alors, il s'était occupé d'Idylle qui avait fait des cauchemar, et de Oubli qui s'était blessé. Puis Passion s'était réveillé et avait voulu discuter. Elle ne s'était rendormi qu'il y a quelques minutes et ses frères et soeurs allaient bientôt se réveiller. Alors, il avait décidé de partir chasser afin que Capucine puisse manger en se réveillant. Il s'éloigna alors un peu plus que d'habitude afin de trouver des proies qui n'avait encore jamais été chassé. Sa fatigue ne l'aiderait pas à trouver une proie, alors autant mettre toute ses chances de son côté.
Prenant en traque un écureuil, il s'approcha avec discrétion mais une branche craqua et la proie prit la fuite. Ivresse resta alors complètement immobile, pensant dans un premier temps qu'il avait marché sur une branche sans faire attention. Mais un autre bruit se fit entendre derrière lui et il fit volte face, griffe rentré mais les muscles prêt à sauter sur le premier danger. Finalement, ce fut un matou sombre, noir et brun qui approchait. Il avait l'air fatigué peut-être légèrement désorienté. Enfin... C'était en tout cas ce que l'ancien aubiste pensait. Il resta sur ses gardes, observant alors le matou avec attention.

Serpent pestait, comme souvent. Il essayais de se trouver de quoi manger, mais il n'arrivait à rien. Son côté aveugle le désorientait, en plus de lui faire commettre des fautes de chatons. Il venait tout juste de faire fuir un mulot en marchant sur une branche sèche. Il ne l'avait pas vue. Sa chasse en solitaire était infructueuse, pour ne pas dire complètement nulle.

Dans un soupir, le matou sombre fit de son mieux pour garder son calme et se replongea dans la traque. Le fumet récent d'un écureuil lui redonna un peu d'espoir, juste avant qu'il ne repère la marque d'un autre félin. 

Se redressant aussitôt, Serpent sonda les alentours jusqu'à apercevoir un pelage gris constellé de noir, qui lui était vaguement familier.

-Qui va là? Gronda t il, toutes griffes sorties.

Ivresse resta de marbre, le regard menaçant mais ne sortant pas les griffes malgré l'air menaçant du matou. Il l'observa de longues minutes sans rien dire, son pelage lui était étrangement familier et il écarta grand les yeux lorsqu'il compris qui se tenait devant lui. Cela faisait des lunes qu'il n'avait pas revu les chatons, depuis la fin du voyage en fait, ces petits avaient été livré à eux même, abandonné par leur mère, même si il ne leurs avait jamais parlé, Ivresse se souvenait encore parfaitement d'eux.

-Tu es l'un des enfants de Nuée Ardente. Qu'est-ce que tu fais là, si loin des clans ?

Serpent se figea net. Pourquoi ce nom ressortait il toujours? Pourquoi? Alors même qu'elle ne les avaient jamais regardés?! L'ombre de Nuée Ardente le suivait donc même en dehors des clans? 

Sa colère endormie se réveilla, et il cracha presque au nez du matou gris, qu'il reconnaissait cette fois.

-Qu'est ce que ça peux te faire? T'es partis toi aussi! Se tournant pour plonger son regard doré dans celui de l'ancien guérisseur et lieutenant du clan de l'Aube, il laissa pourtant son pelage retomber sur ses épaules, et ses griffes disparaître.

Derrière lui, un buisson frémit, et Serpent reconnus aussitôt le parfum de celle qui le suivait partout.

-Sors de là, Trèfle... Je sais que tu me suis. Soupira t il, en fronçant les moustaches et en se détournant complètement de Berceuse du Venin, pas vraiment heureux de savoir que la petite était derrière lui depuis le début de sa traque. 

@Etoile du Golem

Depuis leur départ, Trèfle avait retrouvé un peu de couleur. S'éloigner pour des paysages inconnus lui permettaient de se changer les idées, de ne plus penser qu'à son frère. Bon, le caractère de Serpent n'était pas le plus simple à vivre au quotidien. Pas de discussion sur tout et rien, pas de fou rire, juste le minimum. Trèfle n'en demander pas plus, leur collaboration n'était que temporaire dans tous les cas.

Les leçons se montraient quant à elles plus agréables que prévues, Trèfle parvenant à combler suffisamment son pour qu'ils aient une proie à manger tous les deux jours. Pas de quoi faire un festin, mais suffisant pour survivre.

Un jour alors que la féline bicolore s'amusa à traquer son ainé, elle le surpris, discutant avec un autre félin. Prise de peur, Trèfle ne sortit de son buisson, pas avant que Serpent ne la surprenne forçant son entrée en scène. La jeune chatte découvrit l'inconnu, un vieux chat à la fourrure constellée. Encore un borgne. pensa-t-elle avec légèreté en saluant le solitaire.

L'ancien guérisseur regarda un instant derrière lui, comme pour vérifier que ses enfants étaient bien loin. Pas qu'il n'avait pas confiance, mais sa nouvelle vie lui avait apprit à se méfier de tout le monde.
Il reporta alors son attention sur Serpent, ne s'offusquant nullement de sa réponse acerbe. Après tout, le déserteur n'avait pas tord. Lorsqu'un buisson frémis, Ivresse sentit une nouvelle fois ses muscles se crisper, mais la découverte d'une féline encore plus jeune que Serpent le détendit complètement.

-Mais qu'est-ce que vous faites là ?

Demanda-t-il d'une voix plus inquiète cette fois ci.

-On s'en va. Répondit fermement le matou balafré. Pourquoi devrait il justifier de sa présence à qui que se soit? L'ancien guérisseur n'était peut être pas menaçant, mais il n'en restait pas moins une menace, et Serpent ne se sentait pas encore capable de se mesurer a qui que se soit.

-Tu m'a suivi depuis le début? Demanda t il a la femelle, malgré lui un peu impressionné par sa traque silencieuse. La petite s'améliorais de jour en jour, alors que lui avait l'impression d'être le pire des aveugle.

Une odeur étrange fit presque sursauter le matou gris constellé de noir qui se redressa avec précipitation. La lune était haute et les étoiles brillaient de mille feux, mais l’ancien guérisseur n’y prêta pas réellement attention, essayant plutôt de déterminer d’où venait l’odeur.
Les yeux grands ouverts malgré l’obscurité de la nuit, Ivresse se redressa et se mit à faire le tour du nid de fortune. Les chatons étaient collés au ventre de leur mère, tous dormaient profondément et il ne souhaitait pas les inquiéter, mais alors qu’il marchait, les sens en alerte, il se rendit rapidement compte que l’odeur entourait complètement l’endroit où ils dormaient. Il s’arrêta, s’apprêtant à rejoindre Capucine afin de là réveiller, mais un grattement se fit entendre, et, avant même qu’il ne puisse faire le moindre mouvement, une masse le fit basculer. Des crocs, des couinements, des hurlements, le guerrier tomba et roula afin de déloger la vermine qui venait de l’attaquer, repérant alors ses deux petits yeux en fentes et ses canines découvertes. Un rat.
Les cris de douleurs de Capucine firent cracher le guerrier qui délogea enfin son agresseur, ignorant complètement la douleur qui lui lacérait l’épaule. Il sauta sur la proie avec rage, l’envoyant balader plus loin, il resta quelques secondes à observer, sa proie ne bougeait plus. Faisant volte face, il aperçut le deuxième agresseur accroché au cou de son amie, elle avait beau se débattre, il ne lâchait rien. Ivresse s’affola, il se précipita vers elle, là libérant de la charogne, il ravala un hurlement de douleur lorsqu’il s’accrocha à son poitrail mais finit par réussir à s’en débarrasser. Il observa alors Capucine qui était allongé, du sang giclant de sa plaie. Il chercha autour de lui et apporta des toiles d’araignées, appuyant de toute ses forces sur la plaie afin d’arrêter l’hémorragie, mais malgré tout les efforts du matou, la blessure ne voulait pas arrêter de saigner et rapidement elle arrêta de respirer.
Dans un petit coin reculé d’un rocher, les chatons étaient regroupés ensemble, de grands yeux ébahis, observant la scène sans vraiment comprendre. L’ancien guérisseur fit un pas vers les chatons, mais avant de pouvoir les atteindre, il s’écroula.



Ouvrant les yeux avec difficulté sous une nuit claire et dégagé, le guérisseur se redressa avec précipitation. Une plaine verdoyante et des rochers constellés d’étoiles s’étendait devant ses yeux, laissant l’ancien guérisseur dans un grand étonnement. Il était sur le territoire de ses ancêtres. Depuis qu’il était partit, il n’avait eu aucun signe, rien du tout, mais il se souvenait encore parfaitement de chaque lieu qu’il avait foulé sur ces terres ancestral et le voilà, encore, à observer ces terres qui l’émerveillait toujours autant qu’au premier jour.
Regardant tout autour de lui, étrangement paisible malgré les derniers évènements, Ivresse finit par s’asseoir, attendant patiemment qu’un ancêtre le rejoigne. Alors, il resta là un long moment, son corps ne lui faisait plus mal, son pelage n’était plus couvert de sang, et lorsqu’il voulu faire état de sa motricité, un mouvement à sa droite le fit faire volte face, tombant sur un félin dénué de poil aux yeux d’un vert profond. L’ancien aubiste s’étonna légèrement de ne pas le reconnaitre, étant plutôt habitué à la présence de Cacophonie Empoisonnée, mais il ne s’en formalisa pas.

-Qui êtes-vous ?

-Prince du Bayou. J’étais guérisseur crépusculien, et… Je veillais sur Fleur de Lavande et Lac des Nénuphars.

La mention de son amie guérisseuse serra le cœur du matou qui fit un pas en arrière. Cela faisait tant de lune qu’il était partit que ça lui paraissait être une autre vie.

-Je présume que tu sais pourquoi tu es là.

Ivresse hocha la tête positivement.

-J’ai perdu une vie

Miaula-t-il en se rendant compte soudainement de ce que cela signifiait. Capucine avait perdu la vie, et pendant qu’il était là, ses enfants n’étaient pas en sécurités.

-Nous veillons sur eux, ne t’en fais pas.

Miaula matou comme s’il lisait des les pensées du félin avant de poursuivre.

-Tu n’as pas perdu n’importe quelle vie, tu as perdu la tienne Ivresse.

Le concerné fronça le museau sans réellement comprendre. Qu’est-ce qu’il voulait dire par là ? Mais Prince du Bayou ne le laissa pas le questionner et lui signifia de le suivre. Ils marchèrent alors un long moment sans aucun mot, jusqu’à arriver devant un lac. L’ancien crépusculien passa une patte dans l’eau et cette dernière changea de couleur.

Autour de lui, le paysage changea, d’une nuit étoilée et claire se dessinait désormais un matin ensoleillé et lumineux. En un clignement de paupière, le félin reconnut l’ancien camp nuiteux, et un cri le fit sursauter. Observant autour e lui, il remarque que Prince du Bayou n’était plus présent et il comprit rapidement qu’il était dans un souvenir.
S’approchant des cris qui s’élevaient depuis une tanière, Ivresse aperçut une femelle qu’il ne connaissait, elle était en train de mettre bas, là, dans une grande pouponnière déjà rempli de mousse. Et sous ses yeux, l’ancien guérisseur vit deux boules de poils naître, leurs pelages crème étaient d’une grande douceur et il reconnu alors les deux chatonnes. Petit Nénuphar et Petite Lavande.
Elles étaient parfaitement identiques, et alors qu’il voyait l’image s’estomper, il remarqua Prince du Bayou, fantomatique, penché au dessus des deux petites femelles. Il entendit alors sa voix grave résonné : « Deux chatons naitront, des jumeaux, dont le destin sera d’être guérisseur. Ils auront un apprentissage de chaque clan et seront ainsi le fruit de toute la forêt. Ils auront un rapport spécial avec leurs ancêtres et devront être substituable l’un et l’autre, entre autre, être complémentaire. »
Avant de parvenir à comprendre, le paysage s’effaça complètement et cette fois-ci, ce fut l’Arbre de Vie qui se dressa devant lui, Lavande et Nénuphar, déjà en âge d’être apprenties, se dirigeaient vers le lieu de communion, afin de recevoir leur nom d’apprenties guérisseuses. Mais, les images se firent plus flou et encore une fois, tout disparut et les souvenirs se transformèrent en image saccadé. Il vit le clan du Crépuscule, où Nuage de Nénuphar apprenait les plantes et à soigner les plaies, puis le regard de Nuage de Berserk dans lequel se reflétait le visage de Nénuphar, lors de leur première rencontre, et une nouvelle fois l’Arbre de Vie, des clans qui scandaient leurs nouveaux noms.
Une image se figea, le corps inerte et froid de Fleur de Lavande dont la mort emportait jusqu’à son odeur. Prêt d’elle, Lac des Nénuphars se dessinait et, à son côté, un Prince du Bayou toujours si peu visible baissait la tête avec regret. Et, une nouvelle fois, l’image finit par disparaitre, laissant place à Lac des Nénuphars, dans la tanière des guérisseurs du clan de l’Aube, son corps se tendait à chaque contraction. L’ancienne guérisseuse crépusculienne se vidait de son sang, Ivresse voyait son autre lui se démener pour lui sauver la vie, mais le solitaire vit autre chose, il vit Fleur de Lavande, fantomatique, regarder avec insistance Petite Fragrance. Et, à l’instant même où la sœur disparut, la chatonne poussa un petit cri.
Encore une fois, Prince du Bayou observait la scène avec une certaine tristesse et les souvenirs du vieux guérisseur disparurent. Ivresse ferma les yeux, le cœur lourd, avant de les rouvrir prêt  du lac.

-Je ne suis pas sure de comprendre.

Miaula-t-il complètement perdu avec ce qu’il venait de se passer.

-Tu te souviens ? De ce que Lac des Nénuphars t’as dis lorsqu’elle t’as donné ta vie ?

-« Ne pense pas que cette vie sera une chance, elle te donnera beaucoup plus que tu ne le pense, une seconde chance, oui, mais elle te donne aussi le poids des morts qui n’ont pas eu cette opportunité. A travers cette vie, je te donne aussi ton avenir et ton destin, auquel tu ne pourras pas échapper éternellement. Tu es lié à ton clan et à bien plus que lui. »

Répondit le matou gris et noir sans hésitation. Il tourna et retourna ces paroles dans son esprit mais il ne parvenait pas à comprendre.

-Œil d’Amethyste et Fleur de Lavande sont les mêmes félins, tu le sais, alors la prophétie s’est transmise à elle. Et Lac des Nénuphars, en te donnant sa vie, te là transmise à toi aussi.

Ivresse recula d’un pas, comme s’il venait de se prendre un coup au museau. Est-ce qu’il insinuait que…

-Tu seras toujours un clanique, mais surtout, tu seras toujours un guérisseur, tu ne peux pas échapper à ton destin. Et il n’est pas à prendre à la légère. Tu es lié à Œil d’Améthyste désormais, tu es lié à Lac des Nénuphars et à moi. Tu dois accepter ce que tu ne peux changer.

Le matou resta un instant immobile, observant le matou sans pelage avec hésitation. Il devait donc rentrer. Là, maintenant. Il repensa au corps de Capucine et aux chatons dont il devait s’occuper seul désormais. Il n’y arriverait pas, il avait besoins de son clan. Et cette pensée lui fit réaliser à quel point cette vie lui manquait.

-Ivresse ? Le guérisseur plongea son regard bleu dans ceux vert du matou. Est-ce que tu promets de respecter le code, de ne pas avoir de compagne et de ne plus engendrer d’enfant afin de soigner tes camarades et servir le clan des Etoiles le mieux que tu le peux ?

Le solitaire retint son regard de s’écarquiller, il devait renoncer à Braise du Ciel ? Comme ça ? Il sentit son cœur se serré et pourtant le regard apaisant de Prince de Bayou avait quelque chose d’envoutant. Il baissa la tête.

-Je le promet.

Ils se jaugèrent un instant.

-Tu pourras compter sur moi pour te guider. Maintenant, rejoint les tiens Ivresse des Etoiles.

Brume a écrit:

-On s'en va. Répondit fermement le matou balafré. Pourquoi devrait il justifier de sa présence à qui que se soit? L'ancien guérisseur n'était peut être pas menaçant, mais il n'en restait pas moins une menace, et Serpent ne se sentait pas encore capable de se mesurer a qui que se soit.

-Tu m'a suivi depuis le début? Demanda t il a la femelle, malgré lui un peu impressionné par sa traque silencieuse. La petite s'améliorait de jour en jour, alors que lui avait l'impression d'être le pire des aveugle.

Trèfle ne prêta pas grande attention envers le solitaire, comme si Serpent et elle n'étaient que tous les deux.


-Oui, depuis le surplomb de pierre. expliqua-t-elle sans se détourner. C'était bien ?

Avec le temps, la féline brune et crème gagnait en assurance, et s'autorisait même aujourd'hui à tenir le regard face à son compagnon de route, attitude impensable au début de leur aventure. Des progrès se devaient d'être fait et vite, sous peine de mourir rapidement de faim en regardant toutes les proies leurs échapper.

Ivresse hésita, ne pouvant s'empêcher de balader son regard entre le matou sombre et la petite femelle clair qui l'ignorait d'ailleurs complètement.

-Vous ne devriez pas partir.

Miaula-t-il alors avec précipitation. Il voulait comprendre, mais autre chose l'inquiétait.

-Ton oeil, il est infecté, laisse moi regarder.

Serpent recula aussitôt, découvrant ses crocs à l'ancien guérisseur. Le prenait-il pour une cervelle de souris? Ce n'était qu'une ruse pour l'approcher de son côté aveugle pour lui trancher la gorge! il ne le laisserais pas faire.


-Je n'ai pas besoin de ton aide, guérisseur! Cracha t il, le pelage hirsute, à moitié tapi au sol, le museau outrageusement tourné vers le matou gris comme pour cacher sa blessure.

@Âme Brûlante

Jugement
« La violence dans la violence, l’inhumain dans l’humain. »